“How to enter into the heart of the matter, starting from the first image, the first sound, with only a few clues? With Mon cher sujet for instance, I asked myself: “But how does it begin?” There are all those shots of Agnès walking, that forty-year-old woman, halfway between the mother and her daughter... who goes on, who has to continue. Then there is her first encounter, during a funeral service – because in Mon cher sujet there is death, birth, death, birth. How does the idea emerge, how does the process start? How to cut into the fabric, how to begin? How to present something explicitly but without being heavy-handed, while at the same time quickly establishing the context?”
Anne-Marie Miéville1
Danièle Heymann: Why did you choose this title, Mon cher sujet?
Anne-Marie Miéville: It’s not a great film title. There is already a pronunciation problem. At first, when you start to work, you talk about your project. But a project never gets finished. So it becomes a subject. Around me, as a joke, they started to say: “So how is your dear subject?” The subject, after all, is the theme and the person... The title, which isn’t really a title, just stuck. At the moment of delivering the film, we tried to change it. But all the titles that included the word “woman” or the adjective “feminine” were so dangerous...
[…]
Without looking for the autobiographical part of Mon cher sujet, we can of course see that you are a woman, that you have a mother...
I also have a daughter. In the film, you can see her sing a song she has written; she’s twenty-four. And some months ago, when the film was already finished, my daughter in her turn had a little girl... I start from the principle that we need to talk about what we know. And if in Mon cher sujet there are some common elements with my own history, I think that there are too as many shared elements with the downstairs and the upstairs neighbours.
Danièle Heymann in conversation with Anne-Marie Miéville2
“When it comes to men and women, I feel like I’m honest, and I think that both worlds need to collide or to circumvent each other in order to try and live together.
The soul of the subject is the child, the arrival of the child. It’s creation, creature, and above all creator.”
Anne-Marie Miéville3
“And, to end with, the subject of all the films in the world is: “Tell a story.” But the story is always the same, we already know its bends and whims before it is even invented: the only thing that matters is the end of the stories. Stories need to end, because they are only the fact of telling a story. The old man puts it well in Mon cher sujet: “How could you tolerate this whole story without the certainty that it will end?””
Jacques Aumont4
“Anne-Marie Miéville’s cinema is haunted by the theme of the fissure: the man/woman fissure, of course; the soul/ body, subject/object fissure; and, above all, inner fissures that hauntingly resonate in her work — how to come to terms with yourself, how to find an agreement with your loved one or the one you think you love, how to position yourself within a family genealogy?”
Laure Adler5
« Comment, dès la première image, dès le premier son, entrer dans le cœur du sujet avec quelques indices ? Pour Mon cher sujet, par exemple, je me demande « mais comment ça commence ? ». Il y a tous ces plans d’Agnès qui marche, cette femme de 40 ans, à mi-chemin entre sa mère et sa fille et... qui y va, qui doit continuer ; puis sa première rencontre, lors d’une cérémonie d’obsèques ; car, dans Mon cher sujet, il y a la mort, la naissance, la mort, la naissance. Comment vient l’idée, comment se met en train ce processus ? Comment couper dans le tissu, comment entrer en matière ? Comment présenter quelque chose d’une manière à la fois explicite mais qui ne soit pas lourde, et qu’en même temps le cadre soit rapidement posé. »
Anne-Marie Miéville6
Danièle Heymann : Pourquoi ce titre, Mon cher sujet ?
Anne-Marie Miéville : Ce n’est pas un très bon titre de film. Déjà, il y a un problème de prononciation. Au début, quand on commence à travailler, on parle de son projet. Mas un projet, ça n’arrive jamais. Alors cela devient un sujet. Autour de moi, comme une blague, on com- mençait à dire : « Alors, comment va le cher sujet ? » Le sujet, après tout, c’est le thème, et la personne... Le titre, qui n’en est pas un, est ainsi resté. Au moment de livrer le film, on a encore essayé de le changer. Mais tous les titres qui comportaient le mot « femme » on l’adjectif « féminin » étaient si dangereux...
[...]
Sans cherchez la part autobiographique de Mon cher sujet, on peut évidemment constater que vous êtes une femme, que vous avez une mère...
J’ai aussi une fille. On la voit chanter dans le film une chanson qu’elle a écrite, elle a vingt-quatre ans. Et il y a quelques mois, alors que le film était déjà fini, ma fille à son tour a eu une petite fille... Je pars du principe qu’il faut parler de ce qu’on connaît. Et s’il y a dans Mon cher sujet des points communs avec ma propre histoire, je pense qu’il y en a autant avec la voisine du dessous, et celle du dessus.
Danièle Heymann en conversation avec Anne-Marie Miéville7
« En ce qui concerne les hommes et les femmes, j’ai eu l’impression d’être honnête, et je pense que les deux mondes ont besoin de s’entrechoquer ou de se contourner pour tenter de vivre ensemble. Les hommes n’acceptent pas volontiers d’ouvrir leur univers.
L’âme du sujet, c’est l’enfant, la venue de l’enfant. Il est création, créature, et surtout créateur. »
Anne-Marie Miéville8
« Et, pour finir, le sujet de tous les films du monde c’est : « raconte une histoire ». Mais l’histoire est toujours la même, on en connaît déjà les courbes et les caprices avant qu’elle s’invente : ce qui est essentiel c’est seulement la fin des histoires. Les histoires doivent finir, parce qu’elle ne sont que le fait de raconter une histoire. Le vieux le dit bien dan Mon cher sujet : « Comment pourrait-on supporter toute cette histoire sans la certitude que ça finira ? » »
Jacques Aumont9
« Le cinéma d’Anne-Marie Miéville est traversé par ce thème lancinant de la déchirure : déchirure homme/femme, bien sûr, déchirure âme/corps, sujet/objet et surtout déchirures intérieures qui résonnent de manière lancinante à l’intérieur de son œuvre : comment se réconcilier avec soi-même, comment trouver l’accord avec l’être aimé ou qu’on croit aimer, com- ment se placer à l’intérieur d’une généalogie familiale ? »
Laure Adler10
- 1 Anne-Marie Miéville, “Making a film. Interview by Danièle Hibon,” originally published as “Faire un film” in Anne-Marie Miéville, edited by Danièle Hibon (Paris: Galerie nationale du Jeu de Paume, 1998). Translated by Marcy Goldberg, as published in Two Bicycles. The Work of Jean-Luc Godard & Anne-Marie Miéville by Jerry White (Waterloo, Ontario: Wilfrid Laurier University Press, 2013). This text is also included in Pas de deux. The Cinema of Anne-Marie Miéville, compiled, edited and published by Sabzian, Courtisane and CINEMATEK.
- 2Danièle Heymann, ““We need to talk about what we know”,” Le Monde, 18 January 1989. Translated by Sis Matthé, as published in Pas de deux. The Cinema of Anne-Marie Miéville, compiled, edited and published by Sabzian, Courtisane and CINEMATEK.
- 3Originally published in the press file of Mon cher sujet (1988). Translated by Sis Matthé, as published in Pas de deux. The Cinema of Anne-Marie Miéville, compiled, edited and published by Sabzian, Courtisane and CINEMATEK.
- 4Jacques Aumont, “Notes on the Subject,” originally published as “Notes sur le sujet” in Anne-Marie Miéville, edited by Danièle Hibon (Paris: Galerie nationale du Jeu de Paume, 1998). Translated by Sis Matthé, as published in Pas de deux. The Cinema of Anne-Marie Miéville, compiled, edited and published by Sabzian, Courtisane and CINEMATEK.
- 5Laure Adler, “The Fissure,” originally published as “La déchirure” in Anne-Marie Miéville, edited by Danièle Hibon (Paris: Galerie nationale du Jeu de Paume, 1998). Translated by Sis Matthé, as published in Pas de deux. The Cinema of Anne-Marie Miéville, compiled, edited and published by Sabzian, Courtisane and CINEMATEK.
- 6 Anne-Marie Miéville, « Faire un film » dans Anne-Marie Miéville, édité par Danièle Hibon (Paris : Galerie nationale du Jeu de Paume, 1998). Ce texte est également inclus dans Pas de deux. Le cinéma de Anne-Marie Miéville, compilé, édité et publié par Sabzian, Courtisane et CINEMATEK.
- 7Danièle Heymann, « Il faut parler de ce que l’on connaît, » Le Monde, 18 janvier 1989. Ce texte est également inclus dans Pas de deux. Le cinéma de Anne-Marie Miéville, compilé, édité et publié par Sabzian, Courtisane et CINEMATEK.
- 8Ce texte est paru dans le dossier de presse de Mon cher sujet (1988). Ce texte est également inclus dans Pas de deux. Le cinéma de Anne-Marie Miéville, compilé, édité et publié par Sabzian, Courtisane et CINEMATEK.
- 9Jacques Aumont, « Notes sur le sujet » dans Anne-Marie Miéville, édité par Danièle Hibon (Paris : Galerie nationale du Jeu de Paume, 1998). Ce texte est également inclus dans Pas de deux. Le cinéma de Anne-Marie Miéville, compilé, édité et publié par Sabzian, Courtisane et CINEMATEK.
- 10Laure Adler, « La déchirure » dans Anne-Marie Miéville, édité par Danièle Hibon (Paris : Galerie nationale du Jeu de Paume, 1998). Ce texte est également inclus dans Pas de deux. Le cinéma de Anne-Marie Miéville, compilé, édité et publié par Sabzian, Courtisane et CINEMATEK.