Avec Sonia Wieder-Atherton

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Avec Sonia Wieder-Atherton

Cellist Sonia Wieder-Atherton talks about herself and her musical path. She says she chose the cello because of the legato, and the possibility of a legato that could last forever. Then we are regaled with footage of the artist playing.

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« Il est impossible de consacrer un livre à Chantal Akerman, à ses films, à son univers sans évoquer Sonia Wieder-Atherton, la grande violoncelliste, Claire, sa sœur, qui est également la monteuse attitrée de Chantal, et Marc, leur frère aujourd'hui décédé. Les évoquer, simplement, sans pour autant commettre d'effraction; laisser les images parler d'ellesmêmes et tenter de deviner.

Dans Portrait d'une paresseuse, ce petit court métrage drôlatique où Chantal apparaît, tel Jean-Pierre Léaud, dans son lit, on la voit s'asseoir aux pieds de Sonia pour l'écouter jouer du violoncelle. Dans Trois strophes sur le nom de Sacher, elle la filme, simplement, en train d'interpréter du Dutilleux. Plus curieuse, l'apparition de Sonia dans Rue Mallet-Stevens, un autre court-métrage. Dans un premier plan, on la voit arriver, de nuit, au pied d'un immeuble, au volant d'une BMW. On la retrouve quelques instants plus tard jouant du violoncelle dans un appartement. Image fugace, son frère Marc traverse l'écran, et l'appartement, courant après un enfant.

« Chantal Akerman ne croit pas à l'amour, au romantisme; elle ne croit qu'au désir et à l'affection » a écrit dans Le Monde Jean-Luc Douin à propos de Demain on déménage. Voire. Regardez bien Avec Sonia Wieder-Atherton, voyez ce plan magique qui ouvre le film, ce voile blanc qui semble habiter la musicienne et venir se poser sur la pellicule, écoutez comme la musique semble être « faite » pour le jeu de Sonia, pour l'image de Sonia; écoutez ces mélodies juives qui disent l'histoire de Chantal racontée par le violoncelle de Sonia. La caméra et la musique se font mains, caressant l'interprète et le spectateur avec une douceur infinie. »

Franck Nouchi1

 

« On dit d'elle, de Sonia Wieder Atherton, qu'elle est née à San Francisco, qu'elle a grandi à New-York, puis à Paris, c'est vrai. Que si elle a choisi le violoncelle, c'est parce qu'elle voulait jouer d'un instrument à cordes dont elle pouvait faire durer le son autant qu'elle le voulait. C'est vrai. 

Qu'elle a été subjuguée par la voix de Paul Robeson et puis par celle de la Callas. De son expressivité qui va jusqu'au cri, de son legato. Ce legato qu'elle a cherché seule, pendant des années et avec obstination à retrouver à travers le violoncelle. Oui, elle voulait et elle se battait avec son instrument pour trouver un rapport vocal avec la musique ou une note naît d'une autre et de celle là encore une autre. Oui, elle a tout fait pour faire chanter son instrument. Qu'il devienne voix. C'est vrai.

Ce son, cette voix, elle a fini par les trouver à Moscou auprès de la violoncelliste russe Natalia Shakhovskaia. On dit d'elle qu'elle joue Schumann, Chostakovitch, Elgar ou Bruch. Qu'elle passe de Monteverdi à Kurtag, de Bach à Dusapin ou encore à Dutilleux sans transition aucune, c'est vrai. 

On écrit pour elle. Dusapin, Jolas, Aperghis. Elle fait naître, inspire des solos, des duos et des concertos. On dit d'elle aussi que bien des scènes semblent trop étroites lorsqu'elle paraît. C'est vrai.

Et qu'elle nous empoigne, nous emmène avec elle, si loin et si fort dans des zones encore inconnues, parfois sombres, parfois légères, anciennes ou nouvelles, dans un mélange de plaisir et de tension. On dit d'elle encore qu'elle a un parcours atypique, avec un répertoire atypique, on dit ça d'elle. Mais elle, elle cherche, elle cherche encore et toujours, elle avance, elle bouge, elle n'en finit pas de chercher, elle cherche la brèche. Le son, le souffle. Le souffle des origines. C'est vrai. »

Chantal Akerman2

  • 1Franck Nouchi, "Journal d'une paresseuse - Rue Mallet-Stevens Trois strophes sur le nom de Sacher - Avec Sonia Wieder-Atherton," dans Chantal Akerman: Autoportrait en cinéaste (Paris: Éditions du Centre Georges Pompidou/Editions Cahiers du cinéma, 2004), 199.
  • 2Chantal Akerman, "Avec Sonia Wieder-Atherton," Dossier de presse du film, 2003.
FILM PAGE
UPDATED ON 15.04.2024
IMDB: tt1381030