Charles Dekeukeleire. Vers une libération du cinéma

Le 26 février 2024, Bozar, Avila et Sabzian présentaient un ciné-concert unique. Le pianiste Seppe Gebruers accompagnait en direct sur deux pianos à queue le chef-d’œuvre avant-gardiste de Charles Dekeukeleire, Histoire de détective (1929).

Charles Dekeukeleire (1905-1971) est un pionnier du cinéma belge. Il a réalisé des documentaires et des films expérimentaux dans lesquels il a remis en question le langage du jeune cinéma. Son troisième film, Histoire de détective (1929), est influencé par les mouvements d’avant-garde européens et s’inspire du célèbre genre policier. L’intense jalousie d’un couple marié constitue le point de départ de l’histoire, qui prend des tournures surprenantes entre les mains de Dekeukeleire. Les intertitres influencent les attentes du spectateur, d’absurdes associations surgissent et la répétition de certaines images fait fusionner des lignes temporelles parallèles.

Seppe Gebruers est un musicien belge qui joue en solo et dans des groupes, du jazz à la musique classique contemporaine. Depuis sept ans, il explore la microtonalité au biais de manipulations du système tonal standardisé du piano. Gebruers accompagnait Histoire de détective en jouant simultanément sur deux pianos à queue, dont l’un est accordé un quart de ton plus bas que l’autre. Le dogme de la consonance harmonique est bousculé, tout comme le réalisateur Dekeukeleire rejetait les formes de narration linéaire. La musique dialoguait avec l’absurdité ludique et les rythmes surprenants du film.

À l’occasion de ce concert spécial, Sabzian présentait le texte « Vers une libération du cinéma », écrit par Dekeukeleire en 1932. Manifeste dans lequel Dekeukeleire critique l’industrie cinématographique naissante, ce texte s’oppose également à l’exploitation commerciale du film sonore qui, selon lui, ne serait qu’un gadget technique qui corrompt la pureté du langage cinématographique. Histoire de détective illustre cette philosophie: c’est un film dans lequel le son direct est impensable. Au contraire, le film est une ode à l’œil-caméra, qui traverse le temps et l’espace pour capturer la réalité à l’état pur. Le film montre Bruxelles, la nature et des situations mises en scène qui vibrent, basculent et se retournent. La chorégraphie de la caméra elle-même est au moins aussi importante que ce qui se passe devant l’objectif.

Nina de Vroome, 2024

Naar een vrijmaking van de Cinema

Charles Dekeukeleire | 1932

Vers une libération du cinéma

Charles Dekeukeleire | 1932

Toward a Liberation of Cinema

Charles Dekeukeleire | 1932

Traductions
Inge Coolsaet, Trevor Perri

Traductions introduction
Anton Jäger, Margaux Dauby

Conception graphique
Renaldo Candreva, Dhiaa Biya



Cette publication est une collaboration entre Avila, Sabzian et Bozar dans le cadre de l’exposition Histoire de ne pas rire. Le surréalisme en Belgique.

Avec les remerciements de DW B.

PUBLICATION
2024
NL FR EN