En rachâchant

← Part of the Collection: Danièle Huillet & Jean-Marie Straub
En rachâchant

The child Ernesto doesn't want to go to school any more because, as he says, all he is taught there is things he doesn't know. Marguerite Duras’ 1971 story ‘Ah! Ernesto!’ is the basis for Straub-Huillet’s short, which was originally released as a prelude to Eric Rohmer’s Pauline at the Beach.

 

“What Ernesto objects to is not learning itself, but a learning based on disciplining, framing, categorizing, and systematizing which is fundamental to the constitution of knowledge in modern industrial society. The neat grid of student desks in the classroom, depicted by images that attest to Straub-Huillet’s fondness for diagonal graphic compositions, is another expression of this instituionalized form of exerting social control and power. Ernesto, in the end, reacts in the only possible way, that is to say, in the most utopian way: he gets up and leaves.
‘The type of perfection to which commercial filmmaking aspires (the use of its technical capabilities solely to maintain the established order) [...] mirrors precisely its subservience to dominant social codes,’ Duras once wrote. ‘Commercial filmmaking can be very clever, but rarely intelligent.’ Duras seems to be envisioning the intelligence that the child Ernesto possesses, an intelligence that begins outside of an established form and cultural convention. Straub and Huillet have similar intelligence in mind when they declare that they are trying to make films for children or cavemen; films that do not require prior knowledge or training ir order to be understood.”

Claudia Plummer1

 

« ‘Faire front’, ‘tenir tête à quelqu’un’, jamais l’expression n’aura été filmée si littéralement. En rachâchant est mis en scène, monté et dit comme un duel entre un enfant et son maître sous l’arbitrage plus qu’ambigu des parents, l’hystérique, pour une fois, étant le maître. Le portrait de cet enfant malpoli et farouchement sympathique, il n’y a guère que chez Chaplin qu’on peut en trouver l'équivalent. Même monsieur Hulot avait fini par admettre qu’il valait mieux se soumettre à la loi commune. »

Yann Lardeau2

 

« Or, ce qu’Ernesto – au déla de toute méthode et de tout sociologie – reproche à l’instituteur c’est de se prendre, lui, pour un procréateur et de vouloir lui apprendre, à lui Ernesto, des choses qu’il ne sait pas, d’être un géniteur et pas un accoucheur, d’être possesseur et maître de la sagesse, d’être enfin le contraire de Socrate. L’instituteur est un imposteur. Il refuse le péril de la mise en scène, cette accoucheuse de l’histoire, et se réfugie dans la sécurité du savoir et du pouvoir. De ce savoir et de ce pouvoir qui seront, plus tard, du côté du film que Marguerite Duras tirera de son propre livre. Ici, chez Straub, le film prend les assurances à la lettre. Il tranche dans le mots. Il n’illustre pas et ne s’approprie rien : pas la moindre trace de ce bras de fer où les adaptateurs viennent d’habitude, avec les gestes du matamore, copier les risques de leur maîtrise. Pas l’ombre non plus de cet effacement où ils étalent humblement leur hypocrisie. Ici, personne n’exploite personne. En rachâchant ignore le commerce des bienfaits et le système de la plus-value. La mise en scène tend le fil où l’écriture se découpe, s’ouvre dans le sens de l’épaisseur, se distribue entre les choses qui l’attendent, la reçoivent ou la perdent et entre les voix qui prennent à chaque mot le parti de l’excès : du cri, de la scansion et du filé. En rachâchant comme son héros regus la Loi de cette Ecole où la pédagogie commence par supposer l’ignorance et finit par exploiter l’ignorant. Il multiplie et dilapide du texte. Comme ils l’avaient fait pouur Böll, Corneille, Schönberg, Brecht, Pavese ou Mallarmé, Danièle Huillet et Jean-Marie Straub rendent la fable de Duras à sa liberté. Ni lieu ni maître. »

Louis Seguin3

  • 1Claudia Plummer, ‘(Not Only) for Children and Cavemen. The Films of Jean-Marie Straub and Danièle Huillet,’ in Jean-Marie Straub & Danièle Huillet, edited by Ted Fendt (Vienna: SYNEMA - Gesellschaft für Film und Medien, 2016).
  • 2Yann Lardeau, Cahiers du Cinéma 344 (1982).
  • 3Louis Seguin, Jean-Marie Straub, Danièle Huillet: Aux distraitement désespérés que nous sommes (Paris : Cahiers du Cinéma, 2007).
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UPDATED ON 10.01.2024