Diane Wellington

Diane Wellington

Diane Wellington, a teenager who disappeared in 1938 in South Dakota, has just been found. This is the starting point of this narrative, which revives the codes of silent cinema by relying on intertitles. A story is told from different points of view, which allows Arnaud des Pallières to interpret the silent power of archive images collected on the internet, the origin of which he is completely unaware.

FR

« À travers l’adaptation d’un court récit soumis à Paul Auster par Nancy Peavy, South Dakota, c’est à une ode au cinéma muet qu’Arnaud des Pallières semble ici nous convier. Montage d’archives comme sorties de l’Amérique de Roosevelt, un piano bientôt remplacé par le bourdon d’une musique électronique, et, chargés de dérouler « l’histoire » de Diane Wellington, des cartons aussi réguliers que concis. Diane Wellington semble d’abord user d’une méthode désormais convenue, fondée sur un usage disjonctif du montage, entre une narration écrite (cartons), des images comme illustratives, sans lien direct avec ce que le film paraît vouloir nous raconter, et les enjolivures d’un piano. La permanence de leur éclatement ouvre entre eux une béance où s’inscrivent, par imaginaire, les personnages invisibles de cette histoire. L’habileté du film de des Pallières consiste néanmoins à démultiplier cette béance, à surmonter cette absence figurative d’une absence seconde, celle de Diane Wellington, disparue un beau jour sans laisser d’adresse. Mieux, à décrire, par le biais de ce redoublement, la mutation qualitative de cette absence, quand on apprend que cette « désertion » cache une histoire sordide. De là, sans doute, que les portraits d’archives fassent place bientôt à des routes qui défilent sans fin : comme si l’indifférence se changeait en l’affirmation continuée, effarée, d’une douleur. »

Mathieu Capel1

 

« Diane Wellington est construit à partir d’images d’archives des années 1930-1940 (peut-être un peu plus anciennes pour certaines), tournées essentiellement dans les rues d’une petite ville des États-Unis. L’action se déroule dans le Dakota du Sud, dans un environnement rural. Les hivers y sont rudes. Si l’on ne peut s’empêcher de penser aux Raisins de la colère de John Ford, ces images anonymes évoquent plus directement les photographies prises par Walker Evans ou Ben Shahn dans le cadre de la FSA (Farm Security Administration), organisation constituée par Roosevelt pour remédier aux désastres de la Grande Dépression. Loin de la plénitude et de la lisibilité des images d’Hollywood, ces images documentaires renvoient à quelque chose d’invisible. Parmi les visages souriants qui lui sont présentés, elles laissent au spectateur le soin de deviner où sont les innocents et où sont les coupables. Nous n’avons plus affaire au corps glorieux de l’acteur, mais à de fugaces fragments de vie dont la vérité reste secrète.

Le récit, lui, nous est donné à lire sous la forme de courtes phrases qui apparaissent à l’écran. Il ne s’agit ni de cartons à la manière du cinéma muet ni d’une voix off, mais d’une voix silencieuse qui s’adresse à nous à la première personne et résonne dans notre l’esprit, par l’intermédiaire de la lecture, comme s’il nous était donné de l’entendre. Une voix qui se singularise par son rythme, l’alternance plus ou moins rapide du texte et des images, le découpage des propositions, leur répercussion sur ce que l’on voit, coïncidence ou interruption, suspension, attente, relance. En donnant ainsi le texte à lire, Arnaud des Pallières ramène l’expérience du cinéma, celle de partager l’écoute et la vision d’un film avec une salle entière, au sentiment d’intimité qui n’appartient qu’au livre. Par cette opération, il met le cinéma, art du collectif, au singulier. »

Sylvain Maestraggi2

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UPDATED ON 05.04.2023