Hossein Sabzian II
Quel âge avez-vous ?
J’ai 42 ans. Je suis né en 1954.
Racontez-nous de votre enfance. Qui était Sabzian avant Close-Up ?
Les traits de notre personnalité se dessinent, généralement, pendant notre enfance. Selon Thomas Harris, notre caractère se forge, lors de nos cinq premières années, et ne se révèle que par après. Le lien entre mon enfance et le cinéma s’explique par le fait qu’un jour, mon père m’a pris par la main... et m’a emmené au Théâtre Lalehzar pour voir The Bride of the Sea, avec Vigen. C’est là que mon père, m’a poussé dans les bras du cinéma. Mon père est parti, mais le cinéma ne m’a jamais quitté. J’ai rencontré le cinéma, et je l’ai salué pour la première fois.
Je me souviens que... en tant qu’élève, j’ai fait l’école buissonnière pendant trois mois. Je prenais mes livres et j’allais au cinéma... tous les jours. Parfois, on me refusait l’entrée. Avant de rentrer le soir, je faisais mes devoirs, et je leur mettais des 10. Je les corrigeais en imitant l’écriture du professeur, afin d’éviter tout soupçon. Cela a continué, pendant plusieurs mois. On vivait à Isfahan, à l’époque. J’ai manqué l’école pendant trois mois, jusqu’à ce que l’on s’en aperçoive. Ma mère m’a emmené à l’école, et on m’a battu parce que j’avais fréquenté le cinéma. C’est ce qu’on faisait à l’époque. Rentré chez moi, j’ai promis de ne plus y aller, et on m’a dit que je devais penser à mon avenir.
Je ne peux que maudire le cinéma. Il m’a privé de mon enfance.
Mais, maintenant, je pense que le cinéma d’aujourd’hui, que je considère innovateur, se définit simplement par la couleur et la forme. C’est suffisant.
J’ai passé la moitié de ma vie dans le noir. Ma vie elle-même était dans le noir. Je n’ai jamais vu ma vie avec un objectif. Il n’y a que des images floues.
D’un point de vue financier, j’ai dépensé tout mon argent pour acheter des billets de cinéma. Du point de vue de mes activités, j’ai passé des heures au cinéma. D’un point de vue existentiel, j’ai vendu mon âme au cinéma. C’est ainsi que j’ai passé les meilleurs moments de mon enfance... dans le noir.
Paroles de Hossein Sabzian dans Close-Up Long Shot (Mamhoud Chokrollahi & Moslem Mansouri, 1996).
Sous-titres anglais du film traduits par Nefertari Vanden Bulcke
Images (1) et (2) de Close-Up Long Shot (Mamhoud Chokrollahi & Moslem Mansouri, 1996)